Ottawa, 2010, Propos d’ouverture, Beverley MacLachlin
La très honorable Beverley MacLachlin
Juge en Chef de la Cour suprême du Canada
Bonjour à tous,
Quel plaisir de vous retrouver tous réunis ce matin en cette séance d’ouverture du Troisième congrès de l’AHJUCAF alors que vous abordez la première longue journée de travail sur le thème choisi : « internationalisation de la justice, internationalisation du droit ».
Comme le disait Madame Mireille Delmas-Marty, titulaire de la chaire « Études juridiques comparatives et internationalisation du droit » au Collège de France, dans sa Leçon inaugurale :
« En dépit des apparences, il n’est plus possible aujourd’hui de méconnaître la superposition de normes, nationales, régionales et mondiales, ni la surabondance d’institutions et de juges, nationaux et internationaux, à compétence élargie ».
Je suis tout à fait convaincue que, si les juges qui siégeaient il y a quelque trente ans revenaient aujourd’hui, ils seraient probablement surpris de constater combien nos régimes juridiques s’influencent mutuellement. Ce n’est donc pas un hasard si l’AHJUCAF nous réunit maintenant pour débattre de ce sujet. Nous voulons essayer de trouver des réponses juridiques adaptées à nos interrogations face à la mondialisation et au rôle respectif des tribunaux nationaux et des instances internationales de façon à pouvoir répondre au questionnement de nos concitoyens. Les données rassemblées à la suite des questionnaires préparatoires au congrès offrent un panorama des pratiques suivies par les cours de différents pays. La réflexion que nous allons mener pendant les deux jours qui viennent nous permettra de mieux cerner ce thème complexe et de comprendre l’évolution des pays de la francophonie qui, pour la plupart, ont des racines juridiques communes.
Je voudrais ce matin souligner tout particulièrement le travail extraordinaire de mon collègue l’honorable Louis LeBel, qui s’est investi dans la préparation du congrès. Le thème d’internationalisation de la justice et du droit concorde bien avec son intérêt pour les débats juridiques et son ouverture sur le monde. On peut penser qu’avec votre aide à tous, le juge LeBel vise à remédier à la situation décrite par notre ancienne collègue à la Cour suprême du Canada, la juge Bertha Wilson quand elle disait « Ce qui reçoit souvent une moindre attention dans le monde juridique, c’est comment la mondialisation touche aussi la fonction des juges et des avocats, et comment le développement des liens internationaux a un effet sur les décisions judiciaires et les transforme, tout particulièrement dans le cas des cours d’appel de dernière instance à travers le monde ». Voici qui nous incite à partager nos expériences au sein de l’AHJUCAF, qui se veut l’endroit privilégié où le dialogue des juges peut s’effectuer en toute franchise afin d’améliorer à terme l’organisation et le fonctionnement des cours suprêmes et la qualité de leurs arrêts.
La solidarité au sein de l’AHJUCAF prend toute sa dimension face à la terrible catastrophe naturelle qui s’est abattue sur l’un de nos pays membres, Haïti. Je tiens à saluer ici la présence de Maître Georges Moïse, vice-président de la Cour de cassation haïtienne. Cette institution et ses membres ont été profondément traumatisés. Nous voulons au sein de notre association participer à la construction de l’avenir avec Haïti, au sein d’une Francophonie solidaire.
Permettez-moi donc, mesdames et messieurs les membres de l’Association des Hautes juridictions de cassation des pays ayant en partage l’usage du français, distingués invités, chers amis, de vous souhaiter à nouveau la plus cordiale des bienvenues, ainsi que des échanges enrichissants tout au long de ces deux jours. Le programme social vous offrira, je l’espère, l’occasion de profiter un peu de la belle région de la capitale du Canada tout en continuant vos discussions avec vos collègues.
Ce matin, nous avons le plaisir d’avoir parmi nous plusieurs personnalités qui vont vous adresser la parole. Monsieur Yves Côté, sous-ministre délégué à la Justice vient vous souhaiter la bienvenue au nom du ministre de la Justice du Canada, l’honorable Rob Nicholson.
Monsieur Côté, je vous invite à dire quelques mots.